La particularité du territoire du Touquet est la fluctuation de son rivage. Le trait de côte de la partie méridionale de la "côte d'Opale" se caractérise par son tracé rectiligne et son orientation Nord-Sud. Cependant, L'estuaire de la Canche, comme les autres estuaires picards, marque une rupture sur ce trait de côte en formant la pointe du Touquet, dont l'ancien nom picard "Touque", repris pour nommer la station du Touquet-Paris-Plage, évoque le "tournant" ou bien encore "l'angle" que le littoral décrit en arrivant sur l'embouchure du fleuve Canche. Cette situation morphologique est le fruit d'une dynamique des vents et des courants marins qui déplacent sans cesse le trait de côte de par la formation successive de nouvelles dunes. De décennies en décennies, la mer s'est donc éloignée de la ville, la plage s'est élargie et les dunes ont pris inexorablement de la hauteur, supprimant progressivement les perspectives maritimes depuis la ville.
Le sable allié et ennemi de toujours
Contrairement à bien des endroits du littoral français, au Touquet, la mer n'est pas la menace naturelle directe. La ville a plus à craindre de la progression des dunes et de l'ensablement que des assauts de la mer. La raison en est simple : si les cordons dunaires sans cesse renouvelés sont difficilement maîtrisables en raison de leur mobilité et de leur déplacement, ils forment en revanche la meilleure barrière naturelle contre la montée des eaux lors des grandes marées et des tempêtes.
Le quartier Ridoux
Paul Alexandre Ridoux, architecte arrageois né en 1867 à St Omer et Touquettois de coeur, avait fait, en 1901, l'acquisition de 22 ha de lais de mer. Le projet était alors d'étendre
Paris-Plage et, pour se faire, de bâtir un nouveau quartier, formé par une rangée de villas et d'élégants chalets implantés le long d'une digue promenade longeant la plage. Cette réalisation sera
le premier espace balnéaire réalisé, dans l'ordre historique de la station.
La digue Ridoux, un ouvrage gommé par la nature
La digue Ridoux porte le nom de son bâtisseur. Elle longeait le front de mer de l'actuel boulevard Thierry Sabine, mais il ne reste aujourd'hui comme seules traces qu'une portion d'une cinquantaine de mètres à l'extrémité sud du boulevard, en bordure du parc de l'estuaire. Cet ouvrage de pierres et de briques, commencé en 1903 et achevé en 1905, dominait la plage de 3,75 m. Il devait protéger les nouvelles habitations de la mer et former une esplanade piétonne de 20 m de large et de 500 m de long, partant de l'entrée de la baie de Canche et suivant la laisse de mer. Son existence sera remis en question par les lois de la nature.
L'inévitable ensablement de la digue Ridoux
L'existence de la digue Ridoux sera finalement courte et la nature aura tôt fait de rappeler à l'homme qu'il n'est pas maître de ce territoire sauvage qu'il avait voulu dompter. En 1910, seules
les grandes marées permettent encore à la mer de venir lécher la digue et quatre ans plus tard l'ouvrage commence à disparaître sous la progression des dunes, jusqu'à l'ensevelissement
total.
Les hommes s'adaptent à la transforma- tion naturelle de leur territoire
Afin de permettre à la ville de continuer d'épouser l'arc naturel de la plage, une digue-promenade est construite dans le prolongement de la digue Ridoux. Conçue par le même architecte, elle suivait la laisse de mer, selon le même principe que le premier ouvrage. L'esplanade ainsi conçue a remplacé les dunes qui, au temps de la digue Ridoux, bordaient le boulevard de la mer et la ligne des chalets du front de mer. Elle permit de recréer un vaste espace de promenade devant la ville et de récupérer l'horizon marin que le quartier Ridoux avait perdu.
La digue-promenade supérieure
Située aujourd'hui en retrait de la mer et surplombant la digue inférieure des cabines et des patios, la digue-promenade qui avait prolongé l'arc Ridoux, fut inaugurée en 1922. Elle devint très
vite la mythique promenade de Paris-Plage arborée par les élégantes des années folles qui venaient honorer les rendez-vous mondains de l'entre-deux-guerres.
Une ville qui avance sur la mer au rythme dicté par le sable
La photo ci-dessus est édifiante. Elle montre la situation du Touquet vers 1950 et permet de comprendre l'histoire de la façade maritime de la station. La digue Ridoux et la digue-promenade forment un arc. Les dunes ont isolé le quartier Ridoux de la mer , alors que les premières cabines de plage ont été avancé dans l'alignement du nouveau trait de côte. La célèbre piscine de Paris-Plage fraîchement construite a pris place sur le nouvel espace laissé par le sable, devançant la nouvelle digue de 1960 qui avancera jusqu'à la ligne des cabines pour les supplanter au sein d'une seule et même structure.
La plantation d'une pinède pour protéger le quartier Ridoux
En 1956, le niveau d'ensablement est tel que non seulement la première digue Ridoux avait entièrement disparu, mais le sable, qui avait formé une zone dunaire de 70 m de large devant la ville et de 300 m de large à l'extrémité nord du Quartier Ridoux, menaçait à présent directement la ville. On décida d'entreprendre une vaste opération destinée à enrayer le phénomène. La plantation d'oyats permit de stopper la progression du sable et la plantation d'une pinède le long de l'actuel boulevard Thierry Sabine permit de fixer définitivement la dune et de protéger la promenade du boulevard et son quartier.
La fixation des dunes eut pour effet de favoriser l'élévation du cordon dunaire et la naissance d'un paysage neuf, coupant l'ancien quartier Ridoux et Quentovic définitivement de
la mer. Aujourd'hui, cette vaste zone dunaire intercalée entre la ville et la plage a subi un programme de préservation et de valorisation de l'environnement.
Le parc de l'estuaire couvre aujourd'hui le massif dunaire qui s'étend devant l'ancien quartier Ridoux. Il offre un réseau de sentiers de découverte à travers dunes et pinède, de la digue Nord jusqu'à la baie de Canche. Il est également traversé de sentiers d'accès à la plage qui permettent de franchir l'imposant cordon dunaire qui sépare la ville de la plage.
Un scénario qui se répète inlassable- ment, la "route en corniche"
Créée en 1963 pour longer la mer et offrir la vue spectaculaire sur la plage que la digue Ridoux avait perdue, la route dite "en corniche" se trouve aujourd'hui à son tour totalement isolée de la
mer par un nouveau cordon dunaire. Sa nouvelle version piétonne et cycliste offre aujourd'hui l'attraction des dunes sau- vages du parc de l'estuaire, bien qu'elle n'ouvre plus aucun point de vue
sur la mer, à l'exception des belvédères aménagés à ses extrémités nord et sud.
Une course à la mer salvatrice qui permit d'agrandir la ville!
Au lendemain de la seconde guerre, le rivage, suite à l'accumulation du sable, se trouve éloigné d'environ 70 m de sa digue promenade d'avant guerre. Le maire reconstructeur du Touquet après les 6 années de destruction, Jules Pouget, fait alors construire en contre bas de l'ouvrage précédent, une nouvelle digue promenade, celle des cabines et des patios, appelée souvent "digue basse", notre bord de mer d'aujourd'hui. Le projet, conçu par les architectes Pierre et Louis-Michel Quételart est inauguré en 1960. Il permettra à la station non seulement de renouer avec sa plage, mais d'exploiter surtout cette nouvelle avancée du territoire sur la mer. Cette situation nouvelle sera en effet une opportunité exceptionnelle pour Paris-Plage qui doit renaître d'adapter ses infrastructures à l'ère nouvelle des années de croissance.
Une nouvelle digue pour une ère nouvelle
Grâce à un nouveau concept d'organisation rationnelle et de rentabilisation de l'espace, la nouvelle digue permettra de répondre au boom automobile et à la popularisation massive des bains de mer en intégrant 1200 places de stationnement et 761 cabines de plage intégrées dans les fondations de la digue. L'intégration de patios permit d'augmenter l'offre de location de cabines et de créer des espaces de jeu et de vie. Le concept de la plage est revu entièrement et s'adapte désormais à l'accueil de foules considérables auxquelles on doit faciliter l'accès et qui doivent trouver des espaces de détente à la mesure de leurs attentes. Les caprices du sable auront finalement contribué à propulser Le Touquet-Paris-Plage dans l'ère du tourisme moderne.
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